« Rappeler qu’on existe » : pourquoi les syndicats jouent gros avec la mobilisation contre la réforme des retraites

Ce mardi 7 mars, le front syndical appelle à une nouvelle journée de mobilisation contre la réforme des retraites. Peut-être autant que pour le gouvernement, l’enjeu est de taille pour des syndicats de retour en première ligne après être restés en retrait, voire absents, lors des principaux mouvements sociaux récents. 

Gilets jaunes, Nuit debout, manifestations contre le pass sanitaire… On avait presque oublié les syndicats. « Alors qu’on pouvait croire que la manifestation classique Bastille-Nation était dépassée, on assiste au retour en force ce mode d’action contre la réforme des retraites, avec des niveaux de mobilisation plus connus depuis 1995, analyse Emmanuelle Reungoat, chercheuse au Cepel (Centre d’études politiques et sociales) et spécialiste des mouvements sociaux. On peut dire que c’est le mouvement social de ce début de siècle. »

« Le meilleur outil pour défendre les intérêts des travailleurs »

Une belle revanche pour des syndicats souvent snobés et renvoyés à l’ancien monde, aussi bien par le pouvoir que par les nouveaux mouvements protestataires. « Les Gilets jaunes ont montré que les syndicats pouvaient disparaître, la réforme des retraites est l’occasion de montrer que l’on existe toujours », résume Bruno Cauli, secrétaire adjoint du SGEN-CFDT pour l’académie de Montpellier.

« Historiquement, les syndicats ont toujours défendu la protection sociale, sa défense et son renforcement, c’est logique que l’on soit en première ligne pour les retraites », abonde Bruno Rivier, porte-parole de la CGT dans le Gard. « Certains redécouvrent que l’on reste le meilleur outil pour défendre les intérêts des travailleurs. »

Un déclin du syndicalisme endigué ?

10,3 %. C’est le nombre de salariés déclarant adhérer à une organisation syndicale en 2019 selon les données du ministère du Travail. Ils étaient 11,2 % en 2013. 

Il faut dire que les syndicats ont souffert des transformations du monde du travail. « Aujourd’hui, les grosses entreprises où le syndicalisme se développait jadis sont moins nombreuses, au contraite des TPE et PME où les organisations prospèrent moins », détaille Bruno Rivier. 

Mais avec la réforme des retraites, les adhésions à la CGT et à la CFDT sont deux fois plus importantes qu’en temps normal, indiquent nos confrères de La Voix du Nord

« À la CGT dans le Gard, on constate une hausse jusqu’à 20 % dans certaines grosses entreprises, poursuit Bruno Rivier. Surtout ce que l’on constate, c’est une hausse des adhésions sur le fond. Avant, on adhérait à un syndicat suite à un problème individuel dans son entreprise. Là on observe un retour de la revendication collective. » 

Il faut dire que l’importance des premières mobilisations, mais aussi leur capacité à parler d’une seule voix et à faire durer le mouvement ont redonné de la légitimité aux syndicats. Pour freiner cette dynamique, le gouvernement pourrait tenter de casser l’unité. 

« C’est une des stratégies courante : il s’agit de construire l’idée qu’il y a des ‘bons’ syndicats raisonnables et de les opposer aux ‘mauvais’, trop radicaux », explique Emmanuelle Reungoat.

« Nous, on peut bloquer le pays » 

Selon la spécialiste des mouvements sociaux, la présence des syndicats en première ligne de la contestation reste malgré tout un avantage pour le gouvernement, qui dispose ainsi d’un « adversaire identifié » sur qui taper. Pour le pouvoir, les organisations sont aussi un « amortisseur de la colère sociale », avance Bruno Cauli. 

« Comme nous sommes au cœur des entreprises, nous touchons directement à la production, à l’économie, ce qui nous confère un réel poids dans le rapport de force, estime quant à lui Bruno Rivier. Les Gilets jaunes ont bloqué les ronds-points. Nous, on peut bloquer le pays. »

Reste au gouvernement l’option du passage en force. Mais ce n’est pas sans risque, selon la chercheuse du Cepel. « Ignorer les mobilisations massives peut engendrer de la démobilisation électorale, de renforcer le sentiment de défiance des Français envers la politique, voire de transformer les modes d’actions des opposants, les poussant à la radicalisation », prévient-elle. 

« Même si le gouvernement passe en force, il n’enterrera pas la grogne sociale, balaie de son côté Bruno Rivier. Il est difficile de faire sortir les salariés des entreprises pour qu’ils fassent grève, mais il est encore plus dur de les faire renvoyer au travail s’ils n’ont pas été entendus. »

Quoi qu’il en soit, les syndicats jouent très gros avec la réforme des retraites. Peut-être autant que le gouvernement. « Il y a un important enjeu d’image, avance Emmanuelle Reungoat. Ils doivent montrer qu’ils peuvent obtenir des résultats. » 

À partir du 7 mars, le conflit social prend un nouveau tournant en envisageant l’option des grèves reconductibles. Un nouveau test de taille pour les syndicats.

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