Retraites : l’année 1995 reste-t-elle la référence des syndicats en matière de grèves et de manifestations

De nombreux Français s’en souviennent encore. Durant l’hiver 1995, les fonctionnaires observent plusieurs journées de grèves. Les trains et les métros sont paralysés pendant plus de trois semaines. À certains endroits, aucun train ne roule. Pour aller sur leur lieu de travail, certains n’hésitent pas à marcher, malgré le froid polaire qui frappe la France début décembre. D’autres se rendent à vélo ou font du co-voiturage.

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À l’origine de la colère, la présentation en novembre par le Premier ministre de l’époque, Alain Juppé, d’un plan de redressement de la sécurité sociale comportant des prélèvements supplémentaires sur les assurés et un bouleversement de ses structures. L’alignement prévu des régimes de retraites des fonctionnaires et des agents de services publics sur celui des salariés du privé concentre les mécontentements.

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L’opinion soutient majoritairement ce mouvement social, selon les sondages. Le 24 novembre 1995, la première manifestation contre le plan Juppé mobilise entre 500 000 (selon la police) et 1 million de personnes (selon les syndicats). À son apogée, le 12 décembre, la manifestation rassemble entre un million (selon la police) et deux millions de personnes (selon les syndicats). Devant l’ampleur de la mobilisation, Alain Juppé renonce aux mesures touchant les retraites, mais maintient le reste de son plan, dont une partie finit par être finalement abandonné avec son départ de Matignon, 18 mois plus tard, en juin 1997.

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« Je ne suis pas dans le fétichisme des dates passées », dit Murielle Guilbert de Solidaires

Près de trente ans plus tard, les syndicats espèrent que les Français seront aussi nombreux dans la rue contre la réforme des retraites d’Emmanuel Macron . « Ce sera une très très forte mobilisation. Il faut que ce soit du niveau de 1995, même de 2010 », a déclaré dimanche sur France 3 le numéro un de la CGT, Philippe Martinez.

La victoire de 1995, référence des syndicats ? Au niveau de la mobilisation, aucun doute : le repère est le « bon », estime Nathalie Verdeil, secrétaire confédérale CGT. « Forcément, on a en tête la dernière fois où l’on a fait reculer le gouvernement. Mais nous sommes en 2023, avec une réforme qui est encore différente », explique de son côté Patricia Devron, secrétaire confédérale Force ouvrière (FO).

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« La mobilisation de 1995 fait partie des grands mouvements sociaux, mais ce n’est pas non plus la référence incontournable, avance Yvan Ricordeau, secrétaire national CFDT, chargé des retraites. Et ce d’autant plus qu’il s’agissait alors d’une double réforme, celle de l’Assurance maladie et celle des régimes spéciaux de retraite. Ce n’est pas le cadre qui nous est proposé aujourd’hui. »

« Je ne suis pas dans le fétichisme des dates passées, affirme de son côté Murielle Guilbert, co-déléguée générale de Solidaires. Les choses ne se reproduisent jamais à l’identique, mais il est clair que pour nous, l’objectif, c’est le retrait de la réforme. » À la CFDT, aussi, on explique « construire la mobilisation sans référence historique ». 

Un monde du travail qui a « changé » en 27 ans

Même si les grèves et les manifestations ont permis une victoire syndicale restée dans les mémoires, la comparaison entre la mobilisation de 1995 et celle attendue ces prochaines semaines semble donc s’arrêter là. « Désormais, il est plus compliqué pour un salarié de se mettre en grève et de se mobiliser dans la durée qu’en 1995 », observe Nathalie Verdeil.

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La société a en effet évolué et « le monde du travail a changé », rappelle la secrétaire confédérale CGT. Elle détaille ces changements : « En 1995, nous avions encore beaucoup de salariés implantés dans des entreprises. Les grandes entreprises ont ensuite été déstructurées. De nombreux salariés travaillent davantage dans la sous-traitance et dans l’intérim avec des salariés dont les lieux de travail sont éclatés géographiquement. » Autre modification évoquée par la responsable de la CGT : la réduction « considérable » du nombre de délégués syndicaux dans les entreprises provoquée par les ordonnances Macron sur le travail, en 2017.

Pour autant, à l’inverse de 1995, où la CFDT soutenait le gouvernement, les syndicats, cette fois unis pour la première fois depuis 13 ans, veulent, à nouveau, faire plier l’exécutif. « Des mouvements sociaux comme celui de 1995 sont la démonstration qu’en étant unis et en ayant un mot d’ordre clair, les syndicats ont la capacité d’infléchir les choix du gouvernement quand ils ne vont pas dans le bon sens, avance Yvan Ricordeau. On fait tout pour que ça soit le cas en 2023. »

Murielle Guilbert évoque de son côté le succès des manifestations contre la réforme des retraites à l’hiver 2019-2020. Cette mobilisation « nous a aussi appris des choses dans la manière de nous mobiliser d’une manière unitaire, en tout cas en reliant tous les secteurs en lutte », explique la co-déléguée générale de Solidaires. À l’époque, le Covid-19 avait définitivement sonné le glas de la réforme. Trois ans plus tard, l’épidémie est toujours présente, mais les syndicats ne pourront pas compter sur elle pour obtenir le retrait du texte.

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