Ce qu’il faut savoir sur les caisses de grève des syndicats

La question financière « a toujours été une problématique majeure : pouvoir tenir est quelque chose qui évidement, dans un rapport de force, peut être déterminant », explique l’historien Stéphane Sirot. D’autant plus dans un contexte inflationniste, alors que des grèves reconductibles sont lancées dans plusieurs secteurs.

Le principe des aides sous diverses formes (dons alimentaires, quêtes, spectacles de solidarité…) est « à peu près aussi vieux que la grève elle-même », souligne M. Sirot. Mais le phénomène « a pris de l’importance à la fin du XIXe  » car jusqu’aux années 1870-1880, la France comptait « beaucoup d’ouvriers-paysans » qui cultivaient leur lopin de terre et pouvaient tenir « en utilisant leur propre production ».

Gabriel Rosenman, sociologue qui prépare une thèse sur le sujet, relève que les premières traces de telles caisses « remontent à 1831 et à la révolte des Canuts lyonnais qu’on considère souvent comme l’acte de naissance politique du mouvement ouvrier en France », soit « avant même la légalisation de la grève qui a eu lieu en 1864 ». Cela s’est ensuite répandu de manière non linéaire, notamment avec les « sociétés de secours mutuel » qui visaient à couvrir les risques de décès, maladie, accidents, mais aussi grève, poursuit cet ex-cheminot. Cela permet de « donner du courage pour tenir et de limiter l’addition », dit-il, mais « aucune caisse de grève ne prétend remplacer l’intégralité du salaire ».

“C’est la première fois qu’on collecte autant

en amont des grèves reconductibles”

Certaines centrales comme la CFDT ou FO ont des caisses permanentes alimentées par une part de la cotisation des adhérents. Le budget pour 2023 à la CFDT est d’« un million d’euros », explique Jean-Michel Rousseau, chargé de la caisse qui gère aussi les actions juridiques. « On a une réserve dont tout le monde parle, de 140 millions d’euros, mise de côté depuis cinquante ans » dans laquelle il serait possible de piocher au besoin, ajoute-t-il. Avec ce système, « on sait dès le début du conflit qu’on indemnise à 7,70 euros de l’heure », explique M. Rousseau.

D’autres centrales ont opté pour des caisses non centralisées, comme Solidaires qui y voit un gage de « transparence ». La CGT a réactivé de son côté une « cagnotte Solidarité CGT Mobilisation », lancée en 2020 sur Leetchi, qui affiche 580 000 euros.

En 2016 a aussi été lancée en ligne une « caisse de solidarité » gérée par Info’Com CGT avec SUD-Postes 92. Pour le conflit actuel, elle a récolté plus de 500 000 euros (plus de 4 millions depuis 2016) explique Romain Altmann, d’Info’Com CGT, coordinateur de cette caisse. « C’est la première fois qu’on collecte autant en amont des grèves reconductibles », relève-t-il. « Syndiqué ou non », pour prétendre à une aide, « il faut avoir fait deux jours de grève consécutifs », explique-t-il.

“Rapport de force”

Le réalisateur Gilles Perret relate aussi une opération visant à mettre des films à disposition pour des projections, chaque organisateur reversant le bénéfice à la caisse de son choix. « On en est à 350 soirées-débats », réalisées ou programmées, explique-t-il, tablant sur 150 000 euros « d’ici à la fin du mois ».

Pour Gabriel Rosenman, les cagnottes en ligne ont permis de « reconfigurer les solidarités ouvrières », mais des pratiques différentes se combinent : collectes sur le bord des manifs, vente de « goodies » (t-shirts, DVD, badges, calendriers…) ou encore repas de fête, à l’image des « soupes communistes », historiquement prises en commun par les grévistes.

Après « un certain creux », il relève « un renforcement de la pratique des caisses de grève » à partir des années 2010 et « encore plus ces derniers mois ». Parce que « la pression financière sur les salariés est plus importante », dit-il, mais aussi du fait que certains employeurs en jouent en n’étalant plus les retenues sur salaire. « Les pouvoirs publics jouent beaucoup sur le poids que représentent ces pertes de salaire », abonde M. Sirot. « Ça fait partie du rapport de force. »

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