Future loi Travail : comment le gouvernement espère « calmer » les syndicats

C’est une pièce de théâtre dont le scénario est presque déjà écrit à l’avance. Le lieu : Matignon. Le moment : mercredi 5 avril à 10 heures. Les premiers rôles : Elisabeth Borne et les chefs de file de l’intersyndicale. L’histoire : comment retisser le lien quand la confiance a été brisée ? Après le psychodrame du 49.3, la Première ministre cherche à tout prix une nouvelle voie pour rebondir. Sauf que le chemin est extrêmement étroit, pour ne pas dire bouché. Tant que le Conseil constitutionnel n’a pas rendu son avis sur le projet de loi sur les retraites le 14 avril prochain, les syndicats ne sont pas vraiment d’avis de baisser la garde et de ranger leurs pancartes. Il y a donc peu de choses concrètes à attendre de cette fameuse rencontre. Sinon quelques déclarations fracassantes au sortir des débats.

A l’instar de Sophie Binet, la nouvelle secrétaire générale de la CGT, tous les leaders syndicaux ont décidé de commencer la rencontre en réaffirmant leur désaccord sur le report de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans, défendant leurs propres propositions. En face, la locataire de Matignon a d’ores et déjà annoncé la couleur le week-end dernier en affirmant : « On ne peut pas mettre un projet de loi en pause, ça n’existe pas. » Au sein de la majorité, on pointe surtout le piège juridique dans lequel est enfermé le gouvernement s’il souhaitait décaler de quelques mois la mise en œuvre de la loi après le 1er septembre prochain. « Comme le texte sur les retraites a été embarqué dans un projet de loi de finances rectificatives de la Sécurité sociale, il faut obligatoirement que les premiers effets financiers soient visibles sur l’année 2023 », souligne le député Renaissance Marc Ferracci. Voilà pour le texte officiel de la pièce de théâtre.

En coulisses, cependant, les syndicats réformistes commencent à plancher sur les éléments et les avancées qu‘ils pourraient obtenir dans le cadre de la future loi Travail qui doit théoriquement être bouclée d’ici fin mai et présentée en première lecture avant la pause estivale. La loi Travail, c’est ce gigantesque paquet législatif qui donnera naissance à France Travail, l’organisme qui doit chapeauter tous les intervenants – régions, départements, Pôle emploi, missions locales – en charge des différents éléments de la politique de l’emploi. L’objectif a été martelé lors de la dernière campagne présidentielle : atteindre le plein-emploi à la fin du quinquennat. Pour cela, une multitude de chantiers doivent être lancés. Mais un premier problème technique pointe déjà à l’horizon : le calendrier. « Aller vite sur la loi Travail est incompatible avec une négociation apaisée sur des sujets majeurs comme l’emploi des seniors, l’usure au travail ou le RSA. Il faudrait déjà reculer les horloges », observe Cyril Chabanier, le président de la CFTC. A la CFDT, on parle plutôt de « délai de décence » pour recommencer à dialoguer.

Dans les sujets de nature à remettre un peu de pommade sur les plaies à vif du dialogue social, on trouve d’abord le sujet du partage de la valeur. Pendant que l’exécutif et les syndicats s’écharpaient sur les retraites, les partenaires sociaux sont arrivés à accorder leurs violons, gravant dans le marbre un accord national interprofessionnel sur le sujet, le 10 février dernier. Au menu : un certain nombre de propositions pour réduire l’écart de rémunérations entre les hommes et les femmes, mais surtout des pistes pour étendre les dispositifs d’intéressement et de participation aux petites entreprises – entre 11 et 50 salariés – sous réserve qu’elles aient réalisé des bénéfices sur les trois années précédentes. Un accord que la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) a avalisé du bout des lèvres. Or, le gouvernement s’est engagé à transposer tel quel dans le droit cet accord interprofessionnel. La fameuse loi Travail pourrait être le véhicule législatif idoine pour le faire.

Le CET, la carte magique

Le sujet du compte épargne-temps (CET) universel devrait aussi revenir sur le haut de la pile. L’avantage ? L’idée est portée depuis très longtemps par la CFDT et avait été reprise par Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle. Aujourd’hui, à peine 15 % des salariés bénéficient d’un CET. Deux critères devraient prévaloir : l’universalité, quelle que soit la taille de l’entreprise, et la portabilité, à l’instar du fameux compte-formation qui suit le salarié tout au long de sa vie professionnelle. « Le CET permettrait aussi à certains salariés qui ont épargné des jours sur ce compte de partir plus tôt en retraite s’ils le souhaitent », remarque le député Marc Ferracci.

Dernier gros sujet dont le gouvernement devrait s’emparer pour se rabibocher avec les partenaires sociaux : l’emploi des seniors. Alors que l’index senior pourrait être retoqué par le Conseil constitutionnel, d’autres mesures sont sur la table pour accroître le taux d’emploi des salariés de plus de 58 ans. L’objectif est d’éviter que le report de l’âge légal en retraite ne se traduise par un accroissement du nombre de chômeurs âgés. Si l’option d’une baisse de charges ciblées ne semble avoir la faveur ni du gouvernement ni des syndicats, le gouvernement travaille sur une forme de « prime senior ». Les entreprises sont souvent réticentes à embaucher un salarié senior parce que ses prétentions salariales sont trop élevées. Pour débloquer la situation, l’assurance-chômage pourrait verser à la personne concernée l’écart de salaire entre le nouveau poste qu’elle accepte et l’allocation perçue auparavant.

L’irritant du RSA

A côté de ces mesures phares susceptibles de calmer les syndicats, un irritant demeure, celui du RSA. Déjà, pendant la campagne présidentielle, la proposition d’Emmanuel Macron d’imposer une activité de quinze à vingt heures hebdomadaire aux allocataires du RSA avait déclenché l’ire de la gauche. Pour embarquer les partenaires sociaux sur ce sujet explosif, il faudra d’abord qu’ils se mettent d’accord sur le constat d’échec du dispositif. Très coûteuse (19 milliards d’euros par an en moyenne), cette dépense à la charge des départements a explosé au cours de la dernière décennie. Pire, le RSA est aussi souvent une trappe dont on sort très difficilement. Un rapport publié début 2022 par la Cour des comptes révèle que sept ans après l’entrée au RSA d’une cohorte d’allocataires, seuls 34 % d’entre eux ont retrouvé un emploi et parmi eux un tiers seulement occupe un job stable. « L’obligation d’activité n’a rien à voir avec du travail gratuit. Il s’agirait d’une activité en lien avec l’insertion professionnelle, un temps de formation, de mise en situation professionnelle. Ou du temps consacré à chercher un logement, une garde d’enfants… Autant d’éléments qui sont aussi des freins périphériques à la reprise d’un emploi », plaide Marc Ferracci. Suffisamment vague pour crisper les syndicats.

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